🤬 C'est NOUS contre EUX... - La GS #224
Marketing de... Kendrick Lamar, Startup Drake equation, Selection IA, Framework S.W.I.M, Frameworks de ventes, Hard paywall et campagne de pub.
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Cette semaine, comme quasi tout le monde, j’ai vu passer l’extrait du concert de la mi-temps du Super Bowl.
Chaque année, c’est un événement culturelo-marketing majeur, les deux aspects étant de toute façon toujours associés aux États-Unis.
Cette fois, on a donc eu, devant 133 millions de spectateurs, le rappeur Kendrick Lamar performer sa diss track (son clash) envers Drake.
Oui, celui de la doudoune Moncler dont je parlais dans la GS 218.
Et voilà ce que ça donnait 👇
Bien entendu, moi, ce que j’y ai vu, c’est Kendrick Lamar qui utilise le Super Bowl comme un tremplin stratégique marketing avec d’énormes retombées monétaires à court terme et un impact branding à long terme.
À court terme :
Explosion des streams et des ventes après la performance.
Augmentation de sa valeur pour les sponsors et festivals.
Ventes de tickets pour sa tournée 2025 dans les 5 minutes après la mise en vente, 2 jours après le Super Bowl.
Bon ok, c’était un peu évident, maintenant parlons de la mécanique de branding masterclass qui se cache derrière en 6 points.
1️⃣ Positionnement
Quand on creuse un peu les carrières de Kendrick Lamar et Drake, on distingue facilement les multiples attributs opposés entre les 2 artistes :
MIGNON vs STREET CRED
Drake : Ancien acteur de série teen, quartier aisé de Toronto, mère enseignante
Kendrick : Compton, quartier difficile de Los Angeles, témoin de violence dès l'enfance, culture gang.
EASY LISTENING vs PROFOND
Drake : lyrics simples, refrains accrocheurs, divertissement, commercial
Kendrick : textes denses, références complexes, messages sociaux, introspection, proposition artistique
MAINSTREAM vs RADICAL
Drake : cherche le consensus, le plus grand public
Kendrick : assume des positions clivantes
QUANTITÉ TRENDY vs RARETÉ INTEMPOREL
Drake : productivité massive, multiple sorties par an, réagit aux tendances
Kendrick : albums espacés, rareté calculée, crée des œuvres pour durer
SOCIAL vs SOLITAIRE
Drake : collaborations multiples, présence sociale forte
Kendrick : parcours plus solitaire, sélectif dans ses collaborations
GLOBAL vs ENRACINÉ
Drake : culture pop internationale
Kendrick : ancré dans la culture hip-hop et afro-américaine
Je m’arrête là, mais vous avez l’idée.
Si la carrière de Drake semble avoir été une réussite au fil de l’eau, imposant son rythme aux concurrents de sa catégorie, c’est-à-dire la majorité des autres rappeurs, Kendrick Lamar a quant à lui soigneusement renforcé ses attributs de branding à travers le temps pour s’opposer à cette majorité, et ne pas y être associé, en bref jouer à son propre jeu.
2️⃣ Blame the game (and the Most Valuable Player tant qu’à faire)
Définir des ennemis est le meilleur moyen de renforcer ses attributs de branding, car on se définit autant par ce qu’on est que par ce qu’on n’est pas.
Par conséquent, expliciter ses ennemis a le pouvoir de rendre encore plus intelligible votre positionnement et votre mission.
La narrative (Brand story) dans laquelle vous voulez embarquer votre audience permet de créer de l’engagement et de l’attachement émotionnel.
Ça se passe comme ça 👇
Quand je construis des stratégies de branding, je dis toujours aux founders : “Blame the game, not the player.”
C'est-à-dire qu'il faut s’opposer à un statu quo et définir des ennemis structurels, pas nommer des gens.
Quand Dollar Shave Club attaquait les acteurs du marché du rasoir et le statu quo associé, on devinait qu’il parlait de Gillette, mais ils n’ont jamais prononcé explicitement son nom.
Cependant, dans le hip-hop, la culture du clash est omniprésente. Donc, pour un rappeur, pointer du doigt un autre représentatif de ce à quoi il s’oppose est un super moyen de cadrer son positionnement.
3️⃣ La mécanique du clash
Le clash est historiquement une part du divertissement proposé par le hip-hop, une forme de compétition émulatrice pour prouver qu’on est le meilleur rappeur.
Le clash a aussi le pouvoir de créer une petite narrative dans la brand story de la marque (enfin, du rappeur).
Avec cette petite narrative, on catalyse l’attention du public et on attire les amplificateurs de tout poil avec l’odeur du sang.
Avoir des amplificateurs qui ne sont pas forcément dans la cible est primordial quand on essaie de jouer au jeu moderne des algorithmes.
Quand je publie une vidéo YouTube qui fait 600 k vues, il ne s’agit évidemment pas de 600 k clients potentiels, mais c’est grâce à tous ces amplificateurs que ma vidéo sera proposée à ma cible.
Rand Fishkin parle ici de l’intégration des amplificateurs dans une stratégie de contenu 🇬🇧.👇
Aussi, c’est connu, mais le clash renforce considérablement l’engagement en forçant les gens à choisir un camp et, par conséquent, à entrer émotionnellement dans le clivage.
Enfin, c’est un super moyen de devenir ou de rester un acteur majeur du marché et de rester top of mind.
En France, Booba pratique l’exercice depuis 20 ans.
4️⃣ Category Truth
On parle là des vérités fondamentales et largement acceptées d’un marché, les croyances ancrées dans l'esprit des consommateurs, perçues comme évidentes, les normes implicites.
On est obligé de jouer avec, car elles façonnent les attentes des consommateurs et influencent les décisions d'achat.
Dans le hip-hop, il y a une tension fondamentale qui existe depuis les origines du genre : l'opposition entre succès commercial et authenticité artistique.
Il est donc beaucoup plus efficace de venir placer sa narrative dans une narrative plus large implicite déjà présente dans la tête de l’audience.
Kendrick Lamar, avec son opposition, ravive cette tension.
5️⃣ Pourquoi Drake a perdu ?
Parce que le clash n’était pas pour lui l’aboutissement d’une stratégie de brand building hyper cohérente à travers toutes ses actions depuis 15 ans.
Lui ne jouait pas son branding dans la bataille.
Il a perdu surtout car Kendrick a forcé (puissance 1000) le choix d’un camp.
Avec la diss track Not Like Us, il oppose en chantant they not like us les “nous” aux “eux” (les nazes).
Tu veux faire partie des US ou des THEY ?
Des US, les vrais, les ghettos authentiques, les artistes intègres, les vrais représentants de la culture afro-américaine et de sa profondeur sociale ?
Ou bien des THEY, les rappeurs Walt Disney (Express D 😉), ceux qui travestissent et trahissent la culture pour l’argent, qui font de l’appropriation culturelle, du théâtre, les faux comme Drake, le Canadien fils à maman (et métisse, une critique sous-jacente réelle).
Qui, en écoutant cette chanson, aurait envie d’appartenir au groupe des THEY ?
Aussi, il a perdu car Kendrick est dans un jeu de statut différent de Drake.
Dans le livre Status Game de Will Storr, il est question de 3 jeux distincts :
Succès : la performance
Domination : la force
Vertu : la morale
Pour en savoir plus, checkez cette interview avec Ali Abdaal 👇
Quand Drake joue au jeu du succès, Kendrick, lui, est dans la vertu.
Cette différence est cruciale, car dans un affrontement direct, la vertu l'emporte souvent sur le succès. Celui-ci sera perçu comme "suspect", presque une preuve de "corruption".
Bon, et puis l’accusation de pédophilie, c’est universellement la pire chose qu’on puisse faire, c’est un peu l’argument massue de la vertu.
Qui veut aller dans l’équipe de Drake après ça ?
6️⃣ Et les autres communautés la-dedans ?
Quand Kendrick Lamar parle de "THEY not like US", il parle d’un clivage entre des Afro-Américains.
Normalement, les non-Noirs américains sont exclus de l’équation, ou du moins pas concernés.
Pourtant le public qui écoute en streaming, regarde les vidéos YouTube et va aux concerts est en majorité non-Noirs américains.
Question : pourquoi cette narrative marche quand même sur eux, alors que par design ils ne feront jamais partie de US ?
Bon, alors déjà, depuis les années 50, la culture afro-américaine est l’avant-garde de notre culture occidentale.
C’est flagrant dans la musique : du blues au jazz, en passant par le rhythm and blues avec l’accentuation du 2e et 4e temps dans les mesures (la caisse claire quoi), le rock, la funk, l’électro, le rap. Absolument tout a été créé par les Afro-Américains.
Donc, en ce qui concerne la musique, ils sont un peu le centre de notre monde. Par conséquent, il paraît logique que les non-Noirs américains suivent assidûment l’évolution du mouvement.
Mais je pense avoir une hypothèse encore plus intéressante, et elle me vient encore du marketing.
Elle tient dans cette phrase de Rory Sutherland :
"L’important n’est pas seulement ce que les consommateurs pensent des marques, mais ce qu’ils pensent que la marque pense d’eux."
L’application la plus évidente de cette phrase concerne les marques de luxe et la mécanique de l’exclusivité.
Le rejet ou la distance renforcent l’attractivité d’une marque de luxe, car cela alimente le désir d’appartenance et le statut social.
Tout comme les mécaniques de lancement de communautés fermées, qui n’acceptent que des utilisateurs parrainés (Superhuman, Clubhouse, etc.).
Ici le public non-noir américain sait qu'il ne fera jamais partie du US, mais il est sensible à la façon dont il sera perçu par le US.
En choisissant le camp de Kendrick Lamar, c’est affirmer sa compréhension et sensibilité pour ce qui paraît être le plus respectueux de l’authenticité de la culture.
À l'inverse, soutenir Drake pourrait être perçu comme une validation de l'appropriation et de la dilution de cette même culture.
Kendrick a donc réussi un tour de force : transformer ce qui pourrait être une faiblesse marketing (l'exclusion d'une large partie de son public) en force, en faisant de cette exclusion même une preuve de son authenticité.
Bien joué 👍
📣 Comment construire une marque qui sort du lot ?
C’est la question à laquelle j’ai essayé de répondre pendant des années.
J’ai testé toutes les méthodes de branding existantes, lu tous les livres sur le sujet et expérimenté sans relâche...
Pour formaliser tout cela, j’ai créé une Masterclass Branding dans laquelle je retrace ce parcours initiatique. J’y explique ce qu’il y a de bénéfique dans chaque méthode, comment éviter les pièges que j’ai rencontrés, et ce qui est réellement important pour bâtir une stratégie de marque (vraiment) efficace et différenciante.
🤓 L’autre Drake
L’équation de Franck Drake estime le nombre de civilisations extraterrestres communicantes dans notre galaxie en multipliant plusieurs facteurs liés à la formation des étoiles, des planètes habitables et à l'émergence de la vie et de la technologie.
Bon, au départ, ça nous intéresse moyennement normalement.
Mais dans cet article, une analogie est faite avec la construction et la réussite d’une startup.
En fait, une startup qui réussit est une chaîne de probabilités où chaque élément doit fonctionner pour que l'ensemble réussisse :
Un produit que les gens veulent réellement payer
La capacité à attirer l'attention
Un prix acceptable et rentable
Une différenciation suffisante
La capacité à construire le produit
La maintenance de la valeur dans le temps
Le financement
La dynamique entre cofondateurs
L'acquisition client rentable
Le recrutement et la rétention des talents
La résilience psychologique
La chance
C'est une approche intéressante qui suggère de voir la création d'entreprise sous l'angle de la gestion des risques.
Cliquez ci-dessous pour lire l’article 🇬🇧 ⬇
🤓 Dans la rubrique "Pêle-mêle"
Dans le bordel général des outils IA, il devient difficile de savoir lequel utiliser. Benjamin Congdon nous explique comment il utilise chaque outil et dans quelle situation, en fonction de leurs forces.
Le framework S.W.I.M, créé par une ancienne responsable de la communication de Facebook, permet de gérer la communication autour des moments stratégiques ou des pivots d'entreprise.
Une fois n’est pas coutume, un contenu intéressant vient de LinkedIn FR. Il s’agit de Laetitia Fall, experte en sales, qui nous explique les différents frameworks de vente : BANT, SPIN, MEDDIC, SPICED… et lequel utiliser selon la situation. 🇫🇷 ⬇️
⚖️ Ni pour ni contre, bien au contraire
C’est le retour de Sylvain Gauchet dans la newsletter Growth Gems avec un nouveau format au top.
En gros, il prend une question fermée de marketeux, puis il analyse en deux parties distinctes les avis pour et les avis contre, et enfin, il propose sa synthèse subjective.
Un excellent moyen de se faire un avis personnel sur un sujet, en ayant entendu tous les points de vue divergents.
Cela commence avec la question brûlante pour tous les business en abonnement : “Doit-on mettre un hard paywall ou pas ?”
PS : Au cas où, un hard paywall, c’est quand rien n’est accessible sans payer, comme Netflix.
Cliquez sur l'image pour en savoir plus 🇬🇧 ⬇
🔥 Expression du branding
Oren John parle habituellement de branding, des opérations de communication et des campagnes de pub qui en découlent.
Dans cette vidéo, il a décidé de nous décortiquer les 10 campagnes iconiques qu’il a trouvées les plus impressionnantes et marquantes en termes de Brand Building :
Ralph Lauren
Duolingo
De Beers ("Diamonds are Forever")
Patagonia
Le Creuset
Absolut
Dos Equis
Kiehl's x Equinox
LEGO
Poppi
Cliquez sur l'image pour en savoir plus 🇬🇧 ⬇
Keep it curieux ! 🤓
— Yann
Merci c’est toujours un délice (sauf quand une image n’est pas traduite en français 😢)
Parce que c'est la meilleure newsletter à ma connaissance et qu'on ne félicite pas assez tout le taff que ça représente !!